20 sep 2020

Toujours quatre.

A quelques encablures des vignobles où le soleil caresse les grappes de « folle blanche » , la chapelle Notre Dame de Recouvrance  dresse son portail néogothique de granit déjà armoricain. Petit espace, « demi-jauge » de rigueur. Mais l’organisation de courts « récitals » permet d’entendre les Méliades deux fois, pour deux concerts différents.

Anaïs Vintour, Marion Delcourt, bien sûr, par qui les Méliades peuvent poursuivre le voyage. Esther Labourdette, croisée déjà plusieurs fois, depuis Les Sables d’Olonne jusqu’au projet « Popnox » avec Thierry Machuel. 

Et pour la (sa) première fois, Alice Habeillon, nouvelle venue au sein du quatuor. Voix profonde ; puissance pour dire la colère des Erinnyes, douceur pour souligner d’un bourdon net les cascades mélodiques du chant traditionnel. 

Toujours quatre donc.

Et s’il est fréquent pour les grands ensembles que des chanteurs ou chanteuses puissent « tourner » dans l’effectif global, le nombre permet toujours de conserver le « son » du chœur. Le risque du changement est poli sous la robe des voix multiples où l’oreille se perd et se reconstruit. 

Mais ici point de masse. Le « une par voix » reste à chaque concert l’ouverture d’une voie nouvelle dans la paroi glissante et mouvante de la polyphonie. Un pari.

Un défi même. Refonder à chaque fois, ou presque, le lien de confiance qui prévaut à la capacité de s’écouter ensemble. Poser sa voix sur le son commun, dire du regard comme du geste la respiration partagée, l’arrêt ou le départ, donner à l’Autre l’espace de son expression, offrir le meilleur de la musique ; offrir et servir la finesse de l’écriture, sa virtuosité comme son apparente simplicité. 

Que ce soit dans les airs traditionnels ré habités magistralement par des lectures contemporaines qui créent et renforcent la puissance du mot, ou dans les accords plus inattendus que Thierry Machuel, comme C Ropartz ont su tisser à la demande des Méliades, pour elles, les timbres se sont conjugués au fil des écritures.

Sous les vitraux de cette « recouvrance », c’est à nouveau l’ouverture vers la lumière de cette musique exigeante, où maîtrise et lâcher prise le disputent aux légèretés feintes. Toujours attentives à se dire autant qu’à nous dire, ces quatre voix ont su enchanter l’espace et ceux qui s’y trouvaient assemblés.

Marquant d’une pierre légère l’édifice fragile de la musique vivante et le travail de celles et ceux qui la rendent accessible. 

Text et Photo - Henri Clavé Chastang 

Gétigné, Festival des « Petites chapelles ». Dimanche 20 septembre.

Merci Henri Merci pour vos beaux mots et photos